À flanc de Seine, entre architecture monumentale et souffle d’été, Corail s’installe au Musée d’Art Moderne de Paris avec l’assurance tranquille d’une adresse née pour rayonner. Ici, la saison s’ouvre en grand, sous les citronniers en fleurs et le regard lointain de la Tour Eiffel. Dès midi, la lumière cisèle les tables ; à l’heure dorée, l’air devient tiède, les conversations s’étirent, les cocktails se teintent de grenadine ou d’amertume florale. Il ne s’agit pas d’un simple restaurant éphémère, mais d’un manifeste estival à ciel ouvert.
La terrasse a été repensée comme un décor vivant. Dans cette mise en scène raffinée, chaque détail semble vouloir raconter une histoire — ou plutôt un voyage. Les textiles chatoyants, les motifs ethniques, les matières naturelles ont été sélectionnés par La Casano, jeune maison de décoration qui convoque l’artisanat d’exception venu d’Inde, d’Ouzbékistan ou des anciens empires ottomans. L’élégance s’exprime ici dans la légèreté : un coussin brodé, une lanterne tressée, un motif ikat sur un set de table. Rien de pesant, tout respire la liberté et la chaleur. Corail ne cherche pas l’effet spectaculaire : il impose une ambiance, presque une température émotionnelle.
La carte, elle, suit le même principe. Tout évoque l’été dans ce qu’il a de plus vibrant : la mer, les grillades, l’ombre salutaire d’une pergola, la fraîcheur d’un verre de blanc au déjeuner. En ouverture, les crus s’imposent. Carpaccio de loup de mer aux graines de tomates, sashimi de sériole citronnelle-piment, tartare de thon rouge au raifort. Puis viennent les assiettes plus charnelles : poulpe grillé au fenouil, daurade câpres-citron, saumon à la méditerranéenne. À partager, le poisson du jour entier rappelle les tablées de bord de mer, version haute couture.
Les pâtes jouent la partition italienne en majesté : paccheri au loup de mer, rigatoni crémeux ou encore linguine au homard servies pour deux. Côté viandes, les classiques sont là, mais parfaitement tenus : tartare au couteau, chateaubriand, veau au beurre citronné, et la spectaculaire côte de bœuf maturée à partager.
Les accompagnements, loin d’être un détail, viennent souligner chaque plat : brocolis à l’ail et piment, écrasé de pommes de terre à l’huile d’olive, cœur de sucrine à la feuille près. Même les salades trouvent ici une poésie simple — haricots verts et ricotta crémeuse, sucrine avocat-fêta, ou encore un superbe chou-fleur à la poutargue.
Les douceurs ferment la marche avec retenue et précision : millefeuille vanille-pistache, amande glacée à l’amaretto, assiette de madeleines au citron. À l’heure où la lumière se fait plus douce, les verres se remplissent à nouveau, cette fois de créations fraîches et colorées du bar — un autre territoire d’expression, entre réinterprétation et classiques bien frappés.
Corail n’est pas un secret. C’est une évidence. Une adresse pensée pour embrasser l’été, de midi à minuit, dans une atmosphère de plaisir simple, de beauté douce et d’élégance vécue. Une parenthèse solaire, entre pierre claire et ciel fauve, où Paris devient enfin une ville du Sud.